Cette année, le Prix Lumière (hommage rendu à une figure majeure du septième art) était remis à
Wim Wenders. L'immense majorité de ses films était donc proposée dans la programmation. Pour le plus grand bonheur de nos lecteurs et lectrices à Paris, on notera que la rétrospective ainsi concoctée a déjà trouvé le chemin des écrans de la capitale (depuis le 25 octobre). Pour nous, cela a été l'occasion de se faire recaler de justesse pour une séance de
Paris, Texas, mais aussi de profiter de la ‘Carte blanche à Wim Wenders'. Idée géniale : tous les ans, le récipiendaire du prix s'improvise aussi programmateur. Le choix de Wenders de projeter notamment
Beau travail (Claire Denis) et
Enter the void (Gaspar Noé), deux œuvres ultra stylisées et sensorielles, avait de quoi surprendre quelque peu. Une invitation à envisager différemment sa propre œuvre ?
Plus sympathique encore, on a vu Wenders débarquer à l'improviste pour présenter
un des six films nouvellement restaurés d'Ozu,
Une femme dans le vent (1948). Il conclut sa présentation en s'installant carrément avec le public du cinéma Lumière Terreaux, cédant à la tentation de revoir le film dans une salle comble. Totalement inédit en France, ce dernier a fait l'objet d'une ressortie nationale dans la foulée (le 25 octobre). C'est l'histoire d'une femme dont le mari tarde à rentrer de la guerre et qui, pour s'occuper de son enfant malade, se trouve contrainte de se prostituer. On comprendra pourquoi le film n'est pas dans le canon de son réalisateur (curseurs mélodramatiques poussés un peu loin, reléguant au deuxième plan le génie d'Ozu pour le banal) malgré une passionnante description des mutations d'après-guerre et de l'américanisation balbutiante des tokyoïtes.
Heureusement, les inédits d'Ozu ne sont pas les seuls films du Festival qui auront droit à une ressortie nationale prochaine. On mentionnera notamment
la fameuse trilogie d'Apu de Satyajit Ray –
La complainte du sentier (1955),
L'invaincu (1956) et
Le monde d'Apu (1959) – prévue en salles le 6 décembre prochain. Le plaisir du festivalier est en bonne partie imputable aux secrètes correspondances que les films nous permettent de tisser entre eux. Ainsi ne peut-on pas s'empêcher de rapprocher les films du réalisateur indien d'
Une femme dans le vent d'Ozu tant toutes ces œuvres semblent profondément mues par des préoccupations analogues au néoréalisme européen tout en assumant pleinement un penchant mélodramatique appuyé.