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Entretien avec Gaël Teicher

gael teicher
Le premier long métrage de Laurent Achard, Plus qu'hier, moins que demain, ressort aujourd'hui dans une magnifique copie restaurée. Lors de la présentation du film au festival Fema La Rochelle, nous avons eu l'occasion de rencontrer Gaël Teicher qui distribue le film avec La Traverse. Il nous a parlé de sa collaboration avec Laurent Achard, de la restauration du film et de la manière dont celui-ci parle à notre actualité politique.
À quand remonte votre collaboration avec Laurent Achard ?
En 2014, je voulais produire un portrait de Paul Vecchiali pour la mythique collection Cinéastes de notre temps. Vecchiali, qui était un excessif magnifique, m'a répondu : le seul qui pourrait le faire, c’est Laurent Achard. Laurent était initialement réticent, n'ayant jamais réalisé de documentaire, mais il a finalement accepté et le film est magnifique. On a ensuite fait trois autres portraits de cinéastes (Brisseau, Mazuy et Stévenin) et un court métrage avant la restauration de Plus qu'hier, moins que demain.
De qui venait l'idée de restaurer le film ?
De moi. C’est un de mes films de chevet. Je trouve qu'il est éblouissant, aussi bien dans ce qu'il raconte que dans sa mise en scène. C'est aussi un objet rare dans le paysage du cinéma français de ces dernières années en ce qu'il visite un endroit et des gens dont le cinéma français s'est beaucoup désintéressé. On est dans un petit « bled » – ce qui n'est pas du tout péjoratif dans ma bouche – au fin fond de la France et on soulève délicatement le couvercle de la marmite pour voir le bouillon dessous. Et c'est important de faire cela en ce moment. On a beau déplorer le fait que 12 millions de personnes votent pour le Front National, si on regardait un peu plus loin que nos nombrils, comme le fait Laurent ici, on éviterait peut-être ce genre de catastrophe. Je pense que le cinéma peut guérir des choses. Pas avec une ampleur monumentale, mais il peut guérir certaines choses…
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Plus qu'hier, moins que demain, Laurent Achard (1998)
Comment s'est passée la restauration ?
Il y a deux pièges dans la restauration : essayer de retrouver exactement ce qu'était le 35mm (ce qui est évidemment impossible) ou aller trop loin dans le côté plastique et métallique du numérique. Pour cela, il faut toujours réinterpréter. C'est précieux de pouvoir faire ce travail avec l'auteur parce qu’il a une connaissance intime de l'œuvre. Le distributeur en a une connaissance extime. Je crois sincèrement dans le fait que c'est dans cette rencontre qu'on trouve une justesse. Quand on peut bien sûr… On a pu faire ce travail avec Laurent en 2018-2019. C'était passionnant parce qu'il le redécouvrait lui-même, lui qui revoyait très peu ses propres films. Le négatif original n'était pas en mauvais état et on a travaillé avec un merveilleux laboratoire qui s'appelle Cosmodigital.
Comment présenteriez-vous le film à quelqu'un qui ne connaît pas l'œuvre de Laurent Achard ?
C'est un sommet de mise en scène et un film formidablement joué par des acteurs peu connus. Ils sont tous extraordinaires, d'une justesse. On aurait tort de classer le film dans le naturalisme alors que ce qu'il cherche à faire c'est de transcender le réel et les sentiments par la mise en scène. Au moment de la sortie du film, Frédéric Strauss a écrit : « Laurent Achard croit au cinéma. Le cinéma le sauve et le cinéma nous sauve. » Je trouve que c'est ce qui définit le mieux le film. C'est un film splendide sur des petites gens, sur leurs drames, petits ou grands. C’est un film sans genre. Ce n'est ni une comédie, ni une tragédie. C'est un film choral d’un équilibre absolu. Chaque personnage existe. Il n'y a pas de personnage principal et de personnage secondaire. Tout le monde est au même plan. Ce qui est déjà un sujet. Tu regardes tout le monde pareil et chaque histoire vaut la peine qu'on s’y penche. Et puis, c'est un grand film d’amour : l'amour du cinéaste pour les gens.
© Le Rétro Projecteur 2021–2024
Graphisme par claire malot.
Développement par jroitgrund.
« Pour le grand écran, pas la p'tite lucarne ! »