Comment s'est passée la restauration ?
Il y a deux pièges dans la restauration : essayer de retrouver exactement ce qu'était le 35mm (ce qui est évidemment impossible) ou aller trop loin dans le côté plastique et métallique du numérique. Pour cela, il faut toujours réinterpréter. C'est précieux de pouvoir faire ce travail avec l'auteur parce qu’il a une connaissance intime de l'œuvre. Le distributeur en a une connaissance extime. Je crois sincèrement dans le fait que c'est dans cette rencontre qu'on trouve une justesse. Quand on peut bien sûr… On a pu faire ce travail avec Laurent en 2018-2019. C'était passionnant parce qu'il le redécouvrait lui-même, lui qui revoyait très peu ses propres films. Le négatif original n'était pas en mauvais état et on a travaillé avec un merveilleux laboratoire qui s'appelle Cosmodigital.
Comment présenteriez-vous le film à quelqu'un qui ne connaît pas l'œuvre de Laurent Achard ?
C'est un sommet de mise en scène et un film formidablement joué par des acteurs peu connus. Ils sont tous extraordinaires, d'une justesse. On aurait tort de classer le film dans le naturalisme alors que ce qu'il cherche à faire c'est de transcender le réel et les sentiments par la mise en scène. Au moment de la sortie du film, Frédéric Strauss a écrit : « Laurent Achard croit au cinéma. Le cinéma le sauve et le cinéma nous sauve. » Je trouve que c'est ce qui définit le mieux le film. C'est un film splendide sur des petites gens, sur leurs drames, petits ou grands. C’est un film sans genre. Ce n'est ni une comédie, ni une tragédie. C'est un film choral d’un équilibre absolu. Chaque personnage existe. Il n'y a pas de personnage principal et de personnage secondaire. Tout le monde est au même plan. Ce qui est déjà un sujet. Tu regardes tout le monde pareil et chaque histoire vaut la peine qu'on s’y penche. Et puis, c'est un grand film d’amour : l'amour du cinéaste pour les gens.