Aloysius Christopher Parker, personnage central du premier film de Jim Jarmusch, est sans emploi, sans but précis, comme suspendu dans un état de vacance permanente. En bref, c’est un dilettante bohémien comme il y en a eu tant d’autres dans le cinéma d’auteur. Mais contrairement à ses alter égos de la Nouvelle Vague qui se répandaient en ergoteries exaltées dans les cafés bondés de Saint-Germain-des-Près, Aloysius est empreint d’une profonde mélancolie. Il déambule à travers New York mais la ville est méconnaissable, évidée et décrépite. Ça et là il rencontre des personnages atypiques, hors-système. Mais le charme de leur anti-conformisme a laissé place à une forme de folie plus ou moins prononcée. La contre-culture a perdu, semble nous souffler ce film à l’aune des années 1980. Et c’est dans le creux de cette défaite que Jarmusch puise son style si unique, désenchanté, romantique et langoureux.