Les distributeurs français pensaient-ils à la chanson d’Eddy Mitchell en traduisant le titre de ce formidable film («
Mais je connais le destin/D'un cinéma de quartier/Il finira en garage/En building supermarché ») ? Une chose est sûre: Bogdanovich substitue à l’interprétation décidément trop enjouée de
Schmoll une forme mélancolique beaucoup plus appropriée. Il filme avec une tendresse inouïe les aventures et les balbutiants émois sexuels d’une bande de jeunes lycéens. Mais d’où peut bien leur venir cette mélancolie, à cette jeunesse belle et fougueuse ? Tout d’abord du fait que leur horizon déjà maigre se rétrécit encore à mesure que les habitants d’Anarene, Texas, quittent la petite ville (oui, le cinéma de quartier va fermer…). Mais surtout par le biais des parents qui, au détour de leurs errements, transmettent aux jeunes la mémoire d’un lieu qu’ils devront quitter, les rendant nostalgiques de souvenirs qu’ils ne vivront jamais. S’ils sont plus à l’aise au pieu, les adultes de ce film n’en restent pas moins des enfants en besoin de réconfort lorsqu’ils s’épanchent sur les «
old times ». C’est dans le sillon creusé par cette inversion des rôles que le film nous emporte par sa terrible mélancolie.