Il y a toujours eu quelque chose d’anachronique chez Eric Rohmer, ce grand dandy de la Nouvelle Vague dont les films semblaient tout droit sortis de l’esprit des moralistes du 17e siècle. En abordant frontalement l’actualité politique française, L’arbre, le maire et la médiathèque détonne donc dans son œuvre. Pourtant, l’esprit de la fable est toujours bien présent dans cette histoire. Julien Dechaumes est le maire socialiste du village fictif de Saint-Juire-Champgillon. Pour se faire une stature nationale, il souhaite doter la municipalité d’une médiathèque. Mais sa construction se fera au prix d’un vieux et magnifique saule blanc, ce que ne peut accepter Marc Rossignol, un romantique instituteur interprété par Fabrice Luchini. Film profondément personnel, Rohmer n’y dissimule ni son inclination pour un écologisme conservateur ni son scepticisme envers la politique culturelle de la gauche. En autorisant cependant le récit à adopter les voies disparates de tous ses personnages (l’arrivée d’une journaliste provoque même une sorte d’embardée documentaire), Rohmer dresse avant tout un passionnant portrait de la politique comme lieu de circulation de la parole et du point de vue.